Alors que les Jeux Olympiques de Paris vont débuter dans quelques semaines, le baron Pierre de Coubertin est étrangement absent des chroniques, des médias.
L’hommage qui doit lui être rendu le 23 juin prochain à la Sorbonne (ou il avait prononcé son discours sur son projet en 1894) fait l’objet de nombreuses controverses, et par avance l’ Elysée a annoncé l’absence du Président Macron.
Sulfureux pour les uns, visionnaire pour d’autres quelle opinion pouvons nous avoir sur le père des jeux olympiques modernes.
Un aristocrate idéaliste :
Né à Paris le 1er janvier 1863, dans une pieuse famille d’aristocrates.Durant les premières années de sa vie, sous le second Empire de Napoléon III, il coule des jours heureux dans un monde de privilèges et de raffinement culturel, La guerre de 1870 et les événements de la Commune qui y font suite jettent à bas cette félicité. Son intérêt pour la culture classique de la Grèce et de la Rome antiques est multiplié par les découvertes faites à partir de1874 par les archéologues allemands sur le site d’Olympie.
Il s’ intéresse à l’éducation, il découvre en Angleterre la place du sport dans les études et la formation des élites et en est émerveillé. Il en tire un projet de rénovation du système français d’enseignement. Pour lui le sport contribue à l’épanouissement de la personnalité et à la formation du caractère, il réclame « le droit de jouer ». De la naîtra son ambition de faire revivre les anciens jeux olympiques.
Le 23 juin 1894, à la Sorbonne, les délégués de neuf pays fondent le Comité International Olympique (CIO). Ces pays sont la Belgique, la France, le Royaume-Uni, la Grèce, l’Italie, la Russie, l’Espagne, la Suède et les États-Unis. De ce jour date la naissance des Jeux Olympiques de l’ère moderne. La première édition se tient deux ans plus tard à Athènes, du 6 au 15 avril 1896…
Le défenseur de valeurs et de principes :
C’est l’initiateur d’un mouvement olympique international structuré qui, après avoir failli disparaître faute de revenus au milieu du siècle dernier, a su s’adapter à l’ère du temps, notamment en permettant aux athlètes professionnels de participer aux JO et en commercialisant l’ensemble de ses actifs, à savoir ses emblèmes et anneaux olympiques.
Ardent promoteur de la langue française, il fit du français et de l’anglais les langues officielles des institutions du mouvement olympique,
Pour Coubertin et ses supporters, les valeurs olympiques se confondent avec les valeurs humaines de référence que sont le dépassement de soi, le respect de l’autre, la discipline, l’universalisme, la fraternité et la joie.
Pour Coubertin, l’homme ne peut pas vivre sainement et s’épanouir sans avoir été éduqué dans un esprit de compétition, aussi le besoin de se confronter à autrui est inné en l’homme et a toujours existé. Il nécessaire de l’encadrer, pour lui, selon des règles que l’on retrouve dans la Charte olympique.
La face obscure de Coubertin :
Trois aspects de la personnalité de Pierre de Coubertin sont particulièrement critiquées, même si on replace ses positions dans le contexte de l’époque et dans la mentalité de cet aristocrate.
- Un misogyne :
Pour lui le sport ne peut être que masculin, car permettant un dépassement et un épanouissement que l’on ne peut concevoir au féminin. Il déclare : « le véritable héros olympique est, à mes yeux, l’adulte mâle individuel »
La femme doit se préparer à être mère, elle n’a pas sa place sur un stade sinon « pour applaudir ou couronner le vainqueur».
Pour lui : « Une Olympiade femelle serait impratique, inintéressante, inesthétique et incorrecte». Il s’oppose à leur participation aux premiers jeux et si petit à petit elles font leur place Il persiste en 1928: «Quant à la participation des femmes aux Jeux, j’y demeure hostile ».
- Un raciste :
Dans la logique de son époque et de sa classe sociale il déclare : « les races sont de valeur différente, et à la race blanche, d’essence supérieure, toutes les autres doivent faire allégeance ».
A propos des « journées anthropologiques », compétitions réservées « aux représentants des tribus sauvages et non civilisées » organisées lors des Jeux de Saint Louis, il s’oppose à ce qu’il appelle une « mascarade outrageante », qui, ajoute-t-il, « se dépouillera naturellement de ses oripeaux lorsque ces Noirs, ces Rouges, ces Jaunes apprendront à courir, à sauter, à lancer et laisseront les Blancs derrière eux »
Pour lui, toute société est divisée entre forts et faibles : « il y a deux races distinctes, celle au regard franc, aux muscles forts, à la démarche assurée et celle des maladifs, à la mine résignée et humble, à l’air vaincu. Eh ! bien, c’est dans les collèges comme dans le monde : les faibles sont écartés, le bénéfice de cette éducation n’est appréciable qu’aux forts »
Dans ses Mémoires, il se décrit comme “un colonialiste fanatique“, favorable aux conquêtes coloniales françaises.
- Une caution aux nazis en 1936 :
La réputation de Pierre de Coubertin est entachée par son attitude et son soutien au IIIe Reich au moment des Jeux controversés de Berlin en 1936.
Il n’est pas « dupe des menées nazies », comme il l’écrit à l’ambassadeur de France à Berne en mai 1933 mais il cautionne par ses déclarations l’organisation des nazis : “Dès aujourd’hui, je veux remercier le gouvernement et le peuple allemand pour l’effort dépensé, en l’honneur de la 11e olympiade. J’ai l’impression que toute l’Allemagne, depuis son chef jusqu’au plus humble de ses écoliers, souhaite ardemment que la célébration de 1936 soit la plus belle que le monde ait vue“.
En retour les dirigeants du sport nazi ont orchestré une campagne de nobélisation, qui finit par échouer, et Hitler a même signé un chèque en sa faveur alors qu’il est désargenté. Le vieil homme est flatté et en privé déclare son « intense admiration » pour Hitler.